Poésie : Raccommoder les p'tits bonheurs fêlés.

À partir du texte sur mon métier, j'ai gardé la première strophe du texte initial et je l'ai développée en filant la métaphore de la fêlure. Et il apparaît que le Kintsugi, l'art japonais qui consiste à réparer un pot cassé à l'aide d'une poudre d'or, soit une belle métaphore d'un travail thérapeutique qui intègre l'acceptation de nos imperfections / blessures comme moteur d'épanouissement.

Raccommoder les p'tits bonheurs fêlés

Raccommoder les p'tits bonheurs fêlés.

Accueillir la souffrance — par les mots, les larmes,

les silences, les sourires.

M’effacer parfois

Laisser peser tes maux.

Ou m’imposer, s’il le faut,

pour t’éviter de sombrer.

Raccommoder les p'tits bonheurs fêlés

par les paroles blessantes, les sourires absents, l'ami qui change de trottoir,

le temps passé à travailler

l'actualité

l'habitude

les certitudes

les idées toutes faites

les occasions gâchées

les illusions perdues

Raccommoder les p'tits bonheurs fêlés

Celui du riche, celui du miséreux

De l'adulte, de l'enfant

De l'homme, de la femme

De l'humain, de l'animal

Raccommoder les p'tits bonheurs fêlés

Avec de fins fils d'écoute,

de muettes tendresses

Avec des mots placés à bon escient

Des silences astucieux

ou des rires généreux

Raccommoder les p'tits bonheurs fêlés

Avant que le trou ne s'élargisse

Comme celui des chaussettes

quand j'ôte mes souliers

Avant que le respect ne s'éloigne à jamais

Et que soit confirmée

la fameuse théorie

De la vitre cassée

Raccommoder les p'tits bonheurs fêlés

C'est un art il paraît

Le Kintsugi

C'est japonais

L'art de réparer les pots cassés

Avec la poudre d'or,

L'art de les sublimer.

Raccommoder les p'tits bonheurs fêlés

Tout en laissant passer

Les p'tits grains de folie

La fragilité du temps qui passe

La magie de l'amour

La chaleur de l'amitié

Raccommoder les p'tits bonheurs fêlés

C'est un bonheur, c'est un métier.

Philippe Brami avril 2025