top of page
  • Facebook
  • LinkedIn

Compulsion alimentaire, grignotage : une question de reconnaissance ?

Photo du rédacteur: Philippe BRAMIPhilippe BRAMI

Dernière mise à jour : 31 janv.



Affirmer que grignoter est en lien avec nos besoins psychologiques, c'est une évidence, mieux, une tarte à la crème ! Pourtant je voudrais analyser en détail le lien entre la compulsion alimentaire, le grignotage pour faire simple, et nos besoins de reconnaissance fondamentaux. Je donnerai bien sûr quelques pistes pour répondre à nos besoins de reconnaissance de façon concrète.



La découverte du docteur Spitz : une belle histoire

J'adore cette histoire, je n'en garantis pas la véracité historique, c'est peut-être un récit métaphorique, mais la découverte, elle, a bien été prouvée scientifiquement.


Imaginez une pouponnière des années 1940, un lieu froid et silencieux où tout semble parfait : les bébés sont nourris à heure fixe, leurs couches changées, leurs lits impeccables. Pourtant, ces nourrissons dépérissent. Ils ne pleurent pas, ne sourient pas, et semblent s’éteindre doucement. Le docteur René Spitz, observant cette scène, est troublé.


Il compare ces enfants à d’autres, élevés par leurs mères dans des conditions précaires, mais entourés d’affection. Là où les premiers stagnent, les seconds s’épanouissent. La différence ? Les bébés en pouponnière sont privés d’interactions humaines : pas de sourires, pas de caresses, pas de voix réconfortantes. Leur univers est un désert sensoriel.


Spitz réalise alors une vérité essentielle : les bébés ont une soif de stimulation aussi vitale que leur besoin de nourriture. Les câlins, les regards, les échanges affectifs agissent comme une "vitamine psychologique". Sans cela, leur développement psychologique et physique s’effondre, un état qu’il appellera "hospitalisme".

Cette découverte, bouleversante pour l’époque, a transformé notre compréhension du développement humain. Spitz a révélé que, sans chaleur humaine, les nourrissons dépérissent. Ce ne sont pas des êtres passifs, ils sont avides de connexion et d’amour.

Ce n’est pas seulement le lait ou la propreté qui fait grandir un enfant, mais aussi l’amour et la stimulation. Les nourrissons sont des explorateurs nés, avides de découvrir leur environnement, d’entendre des sons, de sentir des mains les toucher, de voir des visages leur sourire.


Eric Berne et les 3 soifs : stimulation, structure, reconnaissance.

Après les travaux pionniers de René Spitz sur la "soif de stimulation", plusieurs chercheurs ont approfondi et élargi ce concept. Parmi eux, Eric Berne, fondateur de l'analyse transactionnelle, a mis en lumière l'importance des stimulations dans les interactions humaines.

Il a identifié trois besoins fondamentaux, appelés "soifs" : la soif de stimulation, la soif de structure et la soif de reconnaissance.

  • La soif de stimulation englobe les besoins sensoriels que chaque individu cherche à satisfaire à travers diverses activités et interactions. Par exemple, dans un contexte professionnel, les membres d'une équipe peuvent rechercher des stimulations à travers des défis, des interactions sociales ou des environnements dynamiques.


  • La soif de structure : les individus organisent leur temps et leurs relations pour répondre à ce besoin fondamental. Ils peuvent structurer leur temps avec des interactions légères (passe-temps), des activités centrées sur des objectifs ou des contacts authentiques.


  • La soif de reconnaissance : c'est le besoin vital pour un enfant, comme pour un adulte, d'obtenir de l'attention sous une forme ou sous une autre. À défaut d'obtenir de la reconnaissance valorisante ("positive"), la personne recherche des signes dévalorisants, c'est à dire les moyens d'être reconnus, même de façon désagréable.


La compulsion alimentaire et la soif de stimulation : un besoin de connexion 

Dans la pratique thérapeutique, il est fréquent d’observer qu'une personne souffrant de compulsions alimentaires cherche inconsciemment à combler un vide. Ce vide peut être d’ordre affectif, émotionnel ou sensoriel. Il est lié avec les 3 soifs découvertes par Berne :

  • Vide affectif /soif de reconnaissance : Je me sens seul et je mange

  • Vide sensoriel / soif de structure ou soif de stimulation : je m'ennuie et je mange

  • Vide émotionnel / soif de reconnaissance : j'ai une émotion désagréable et je mange


Un adulte peut ressentir une forme de "faim psychologique"( besoin affectif, émotionnel ou sensoriel). Il s'agit d'une quête inconsciente de contact, de réconfort ou d’excitation sensorielle lorsqu’il se sent isolé ou émotionnellement insatisfait. Dans ce contexte, la nourriture devient un substitut : elle offre une réconfort immédiat et facilement accessible, qu’il s’agisse de saveurs, de textures ou même de l’acte mécanique de manger. 


La compulsion alimentaire : une tentative de répondre à nos besoins fondamentaux

En s’inspirant de la théorie de Spitz, il apparaît que ces compulsions alimentaires ne sont pas des faiblesses, mais une tentative de répondre à des besoins fondamentaux non comblés. En cultivant des sources alternatives de stimulation et de connexion, il est possible de nourrir son esprit et ses émotions tout autant que son corps, et ainsi, de réduire durablement ces comportements compulsifs. 


Des solutions inadéquates qui amplifient le problème

L'hypnose nous enseigne qu'il est très difficile de lutter contre un besoin par un effort de la volonté. Et lorsque la volonté semble victorieuse, l'inconscient "se venge" par un comportement alternatif (compensation), masqué ou ultérieur ( l'effet rebond).


Lorsque nous échouons à lutter, nous renforçons nos sentiments d'échecs.

La culpabilité qui en découle est elle-même un sentiment douloureux qui appelle un réconfort.


Les sentiments d'échec et de culpabilité ont donc un double effet Kiss cool: le besoin de combler ce sentiment douloureux appelle un réconfort alimentaire accru.

Il devient absolument nécessaire de trouver des réponses efficaces plutôt que de perpétuer des solutions qui amplifient le problème.


Vers des solutions alignées sur les besoins fondamentaux 

Pour répondre à ces compulsions alimentaires en profondeur, il est essentiel de s’inspirer de l’idée de stimulation affective et sensorielle évoquée par Spitz : 


1. Créer des moments d’interaction humaine significative : Cultivez des liens émotionnels sincères. Partager un repas en bonne compagnie, échanger des sourires ou des conversations peut nourrir ce besoin de connexion, bien plus que la nourriture elle-même. 


2. Explorer d’autres formes de stimulation sensorielle : Remplacez le grignotage par des activités qui sollicitent vos sens autrement. Cela peut inclure écouter de la musique apaisante, toucher des textures agréables (comme un tissu doux), s’envelopper dans une couverture chaude, marcher, courir, écrire, chanter... 


3. Répondre au vide émotionnel par l’expression créative : Parfois, écrire, dessiner, danser ou cuisiner peuvent nous permettre d'exprimer nos émotions. Ces activités stimulent tout en apportant un sentiment d’accomplissement. 


4. S’ancrer dans le moment présent : La pratique de la pleine conscience peut aider à différencier une véritable "faim physique" d’une "faim émotionnelle". En prenant quelques instants pour respirer profondément et écouter son corps, il devient plus facile de reconnaître si le besoin est sensoriel ou affectif. 


Les vertus de la psychothérapie brève

Lorsque les premières tentatives de solution centrées sur le changement d'environnement ou de comportements alimentaires ne suffisent pas, il est nécessaire d'avoir une approche plus large qui intègre les dimensions affectives, relationnelles et sensorielles.

C'est là qu'une psychothérapie brève peut être vraiment précieuse.

J'utilise 3 types d'outils intéressants pour faire face aux compulsions alimentaires :

  • Les outils de libération émotionnelle comme l'EFT ou l'EMDR / RITMO.

  • L'analyse transactionnelle pour prendre conscience et remodeler les relations dans nos systèmes affectif, familial et professionnel.

  • Une approche plus existentielle et réflexive sur notre vie nous aide également à la structurer pour trouver des sources de stimulation qui répondent à nos besoins.


Conclusion

Le traitement des troubles alimentaires reste toujours beaucoup focalisé sur les aliments que nous absorbons, les calories, l'équilibre nutritionnel, la façon de s'alimenter etc.

Nous n'avons donc pas intégré, dans la plupart des cas, la découverte de Spitz !

Nous procédons comme les nurses américaines des années 40, très scrupuleuses sur le plan de la diététique mais ignorant complètement les besoins affectifs des individus.

En bref, les compulsions alimentaires mettent en jeu 3 types de facteurs :

  • la structure de notre temps, nos activités domestiques, amicales, professionnelles...

  • La façon dont nous gérons les relations aux autres.

  • La gestion de nos émotions, qui sont en lien avec le stress, les perturbations de toutes sortes que nous subissons (deuils, ruptures, problèmes relationnels, affectifs, familiaux etc)


Un accompagnement personnalisé est souvent nécessaire ; la bonne nouvelle est qu'il est efficace et qu'il permet d'accompagner le changement de la personne avec des retombées positives dans tous les domaines de sa vie.


N'hésitez pas à prendre contact avec moi si vous souhaitez faire un travail de psychothérapie brève orienté vers le traitement de la compulsion alimentaire.



Un autre de mes posts consacré aux 6 moyens de structurer le temps est un lien direct avec ce post : lire


Références:

  • De nombreux livres sur l'analyse transactionnelle/Eric Berne sont disponibles en librairie.


  • Articles de René Spitz sur l’hospitalisme :

Spitz, René A. (1945). *Hospitalism—An Inquiry into the Genesis of Psychiatric Conditions in Early Childhood*. *The Psychoanalytic Study of the Child*, **1**, 53-74.


Spitz, René A.(1946). *Hospitalism: A Follow-up Report*. *The Psychoanalytic Study of the Child*, **2**, 113-127.





7 vues0 commentaire

Comments


bottom of page